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Nouvel article

vendredi 28 janvier 2011, par Gil

les changements de condition de travail d’un élu doivent obtenir l’accord express du salarié élu.

un salarié avait subi d’année en année un changement de ses conditions de travail

Il a été débouté en premier lieu par la cour d’appel au motif qu’il est resté passif durant ces années.

La Cour de cassation se prononce autrement

Texte officiel Janvier 2011

Arrêt de la Cour de cassation
Chambre sociale
Audience publique du 1 décembre 2010
N° de pourvoi : 09-42078
Inédit
Cassation partielle

Cour de cassation
Chambre sociale
Audience publique du 1 décembre 2010
N° de pourvoi : 09-42078
Non publié au bulletin
Cassation partielle
Mme Morin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président
Me Balat, SCP Piwnica et Molinié, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles 1184 du code civil et les articles L. 1221-1 et L. 2411-5 du code du travail ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X...a été engagé le 13 juin 1985 par la société nettoyage industriel et chimique en qualité de mécanicien ; que son contrat de travail a par la suite été transféré à la société Sodi ; qu’il a été élu délégué du personnel suppléant les 3 décembre 1999, 14 janvier 2002 et 26 janvier 2004 puis délégué du personnel titulaire le 13 janvier 2006 ; qu’invoquant une modification unilatérale de son contrat de travail, il a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de celui-ci aux torts de la société Sodi ;
Attendu que pour débouter le salarié de cette demande, l’arrêt, après avoir constaté que la part de l’activité mécanique dans l’emploi du temps de M. X...avait diminué progressivement, pour disparaître en 2005, et qu’il occupait désormais un poste de “ chauffeur-opérateur “ à plein temps, énonce que ce dernier n’a pas été victime d’un bouleversement de ses conditions de travail et que l’ancienneté de la modification des fonctions, devant laquelle l’intéressé est resté passif pendant plusieurs années, en dépit de la protection que lui assurait son mandat, ne permet pas de considérer que les manquements de l’employeur à ses obligations étaient suffisamment importants pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’aucune modification du contrat de travail ni aucun changement de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé sans son accord exprès qui ne saurait résulter de la poursuite de l’exécution du contrat aux nouvelles conditions sans protestation ni réserve, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il soit nécessaire de statuer sur la troisième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il donne acte à la société Sodi de son engagement de payer au salarié une somme en complément des indemnités journalières, l’arrêt rendu le 10 mars 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Sodi aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sodi à payer à M. X...la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir débouté Monsieur Didier X...de ses demandes dirigées contre la Société SODI ;
AUX MOTIFS QUE la thèse de Didier X...selon laquelle il se serait brutalement vu déqualifier début 2006 est contraire à la réalité, puisque la S. A. SODI a communiqué une « note aux chauffeurs » visée par le salarié le 4 juillet 2003 ainsi que des disques du chronotachygraphe du véhicule conduit par Monsieur X...de 2001 à 2007 ; qu’il ressort des pièces et des débats que depuis plusieurs années, Didier X...exerçait la fonction de chauffeur opérateur tout en effectuant des travaux de mécanicien d’entretien ; que les opérations importantes d’entretien et de maintenance étant confiées de plus en plus fréquemment à des entreprises extérieures, la part de l’activité mécanique dans l’emploi du temps de Didier X...a diminué progressivement pour disparaître en 2005 ; que le salarié n’a donc pas été victime d’un bouleversement de ses conditions de travail ; qu’il a seulement vu celles-ci évoluer sur plusieurs années, la dernière étape de cette évolution étant antérieure d’un an à la saisine du conseil de prud’hommes et antérieure également à la candidature du salarié aux élections des délégués du personnel du 13 janvier 2006 ; que les raisons pour lesquelles Didier X...s’est emparé soudain d’une modification déjà ancienne pour se dégager de ses liens contractuels et renoncer par voie de conséquence à son mandat demeurent inconnues ; que l’ancienneté de la modification des fonctions, devant laquelle Didier X...est resté passif pendant plusieurs années, en dépit de la protection que lui assurait son mandat, ne permet pas de considérer que les manquements de l’employeur à ses obligations étaient suffisamment importants pour justifier encore la réalisation judiciaire du contrat de travail à la date de saisine du conseil de prud’hommes ;
ALORS, D’UNE PART, QUE l’accord du salarié à la modification de son contrat de travail doit être exprès et ne peut résulter de la seule poursuite du contrat aux conditions modifiées ; qu’en estimant que Monsieur X...ne pouvait invoquer une modification de son contrat de travail à l’appui de sa demande tendant à la résiliation judiciaire de la convention aux torts de la Société SODI, au motif que l’intéressé était « resté passif » après la modification de ses fonctions qui ont « évolué sur plusieurs années », la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé une acceptation expresse du salarié quant à la
modification de son contrat de travail, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 et 1184 du Code civil ;
ALORS, D’AUTRE PART, QUE s’agissant des salariés protégés, aucune modification du contrat de travail et aucun changement des conditions de travail ne peuvent leur être unilatéralement imposés ;
qu’en estimant que Monsieur X...avait pu se voir imposer une modification de ses fonctions « en dépit de la protection que lui assurait son mandat » de délégué du personnel, dès lors que cette modification était intervenue « progressivement » et que le salarié n’avait pas été « victime d’un bouleversement de ses conditions de travail », la cour d’appel a violé l’article L. 2411-5 du Code du travail et l’article 1184 du Code civil ;
ALORS, ENFIN, QUE le juge saisi par un représentant du personnel d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail apprécie les manquements reprochés à l’employeur compte tenu de l’ensemble des règles applicables au contrat de travail de l’intéressé et des exigences propres à l’exécution du mandat dont il est investi ; qu’en constatant que la modification du contrat de travail de Monsieur X... s’était effectuée alors qu’il détenait un mandat de délégué du personnel, sans rechercher si la modification litigieuse n’avait pas eu un effet sur l’exécution de ce mandat, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2411-5 du Code du travail et 1184 du Code civil.
Décision attaquée : Cour d’appel de Lyon du 10 mars 2009