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un changement d’horaire doit être justifié par une réorganisation interne des services pertinente

dimanche 14 novembre 2010, par Gil

Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mercredi 15 septembre 2010
N° de pourvoi : 09-41526
Non publié au bulletin Cassation partielle sans renvoi
Mme Collomp, président
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 15 avril 1980 en qualité d’aide
comptable par la société Neudis exploitant un hypermarché sous l’enseigne Leclerc à Lyon ;
que le 28 janvier 2005, la salariée a sollicité un congé sabbatique qui lui a été accordé pour
la période du 7 novembre 2005 au 6 octobre 2006 ; qu’à son retour dans l’entreprise,
l’employeur l’a affectée à la gestion comptable des coffres et lui a modifié à plusieurs
reprises ses horaires de travail ; que la salariée, après avoir refusé la dernière modification
de ses horaires applicables au 15 janvier 2007, a été en arrêt de travail pour maladie à
compter du 16 janvier jusqu’au 31 mars 2007 ; qu’à la suite d’une visite de contrôle,
l’employeur a cessé de verser le complément de salaire à compter du 12 mars ; que la
salariée ayant réitéré son refus des nouveaux horaires à la reprise du travail, l’employeur l’a
licenciée pour faute grave le 16 avril 2007 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt d’avoir déclaré le licenciement sans cause réelle et
sérieuse et de l’avoir condamné à payer diverses sommes à titre de salaire correspondant à
la période de mise à pied, d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés
afférents, d’indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages et intérêts, alors,
selon le moyen :
1°/ que le licenciement était fondé sur le refus par la salariée de ses nouveaux horaires de
travail à compter du 15 janvier 2007 et ne présentait aucun lien avec la contestation, par elle,
de l’affectation qui lui avait été donnée en octobre 2006 à son retour de congé sabbatique et
à laquelle la salariée s’était pliée ; qu’en se fondant, pour dire que le refus par la salariée de
ses nouveaux horaires de travail était légitime, sur le fait que « l’employeur ne produit
aucune pièce démontrant une réorganisation interne du service comptabilité et du service
caisse justifiant le changement d’affectation d’Hélène X... », la cour d’appel a méconnu les
termes du litige en violation des articles L.1232-6 du code du travail et 4 du code de
procédure civile ;
2°/ qu’en reprochant à la société Neudis de ne pas produire d’éléments justifiant le
changement d’affectation de Mme X..., sans constater que ce changement d’affectation
aurait constitué une modification du contrat de travail de l’intéressée, laquelle avait au
demeurant uniquement refusé les nouveaux horaires, la cour d’appel a statué d’après des
motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1221-1,
L.1232-1, L.1234-1, L.1234-5 et L.1235-1 du code du travail ;
3°/ que la cour d’appel a expressément constaté qu’à son retour de congé sabbatique, la
salariée avait accepté de travailler le samedi et qu’elle refusait seulement la dernière
modification des horaires de travail décidée par l’employeur le 8 janvier 2007 et qu’elle
prétendait s’en tenir aux horaires qui lui avaient été notifiés le 27 septembre 2006, lesquels
prévoyaient qu’elle devrait travailler le samedi ; qu’en retenant néanmoins, pour dire que le
refus par la salariée du dernier changement de ses horaires de travail était justifié et ne
présentait donc pas un caractère fautif, que l’employeur avait abusé de son pouvoir de
direction en imposant à Mme X... de travailler le samedi, la cour d’appel n’a pas tiré les
conséquences légales qui s’évinçaient de ses propres constatations et a violé les articles
L.1221-1, L.1232-1, L.1234-1, L.1234-5 et L.1235-1 du code du travail ;
4°/ qu’à tout le moins, en constatant que la salariée avait accepté les modifications d’horaires
« liées aux fêtes de fin d’années » et en reprochant à la société Neudis de ne produire aucun
document de nature à expliquer les nombreux changements d’horaires de Mme X... pendant
cette même période, la cour d’appel a statué par des motifs contradictoires, en violation de
l’article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que la cour d’appel a elle-même relevé que les modifications d’horaires imposées à Mme
X... au cours des mois de décembre 2006 et janvier 2007 étaient « liées aux fêtes de fin
d’année », ce dont il résultait qu’elles présentaient un caractère temporaire et ponctuel ;
qu’en considérant néanmoins comme abusifs ces changements d’horaires de travail, la cour
d’appel a, là encore, méconnu les conséquences légales de ses propres constatations et a
violé les articles L.1221-1, L.1232-1, L.1234-1, L.1234-5 et L.1235-1 du code du travail ;
6°/ que l’employeur peut, dans l’exercice de son pouvoir de direction, modifier les horaires de
travail du salarié y compris lorsqu’il en résulte un changement de la répartition des jours de
la travail entre les jours de la semaine ; qu’en décidant que Mme X... était en droit de refuser
cette modification sans faire ressortir que celle-ci constituait une modification de son contrat
de travail, ou bien qu’elle aurait procédé d’une exécution déloyale du contrat, ou encore
qu’elle aurait engendré des conséquences particulières au regard de la vie privée et de la
situation personnelle de la salariée, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au
regard des articles L.1221-1, L.1232-1, L.1234-1, L.1234-5 et L.1235-1 du code du travail ;
7°/ que si, aux termes de l’article L. 1332-4 L. 122-44 ancien du code du travail, aucun fait
fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un
délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a connaissance, ces dispositions ne
font pas obstacle à la prise en considération de faits antérieurs au délai de deux mois dans
la mesure où le comportement du salarié s’est poursuivi dans ce délai ; que dès lors qu’il
était constant aux débats que la salariée avait maintenu de façon continue son refus de se
conformer aux consignes de l’employeur en matière d’horaires de travail, la cour d’appel, à
supposer qu’elle ait tacitement adopté les motifs du jugement entrepris, aurait à tort
considéré comme prescrits les manquements reprochés à la salariée et aurait ainsi violé par
fausse application l’article L.1332-4 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d’appel, sans méconnaître les termes du litige, appréciant
l’ensemble des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, après avoir relevé que la
salariée, tout en conservant sa qualification d’aide comptable, son coefficient et sa
rémunération dans sa nouvelle affectation de gestion comptable des coffres, s’était vue
confier à son retour de congé la préparation des fonds de caisse et le comptage de la recette
journalière, fonctions qui étaient auparavant assurées par les employés du service caisse –
coffre, et que ce changement de fonction avait conduit l’employeur à la faire travailler le
samedi, a constaté, qu’après avoir accepté la modification initiale de ses horaires de travail
liée aux fêtes de fin d’année, la salariée avait eu, à plusieurs reprises, ses horaires modifiés
au point de devoir travailler tous les jours jusqu’à 19 heures et tous les samedis sans pouvoir
bénéficier de deux jours de congé d’affilée, que l’employeur ne démontrait nullement la
nécessité du changement d’affectation au retour du congé ni les nombreux changements
d’horaires ; qu’en l’état de ces constatations, elle a pu décider , sans encourir les griefs du
moyen, que l’employeur avait abusé de son pouvoir d’organisation et que le refus opposé par
la salariée ne pouvait dès lors constituer une faute ce qui rendait son licenciement sans
cause réelle et sérieuse ; que le moyen qui s’attaque à des motifs erronés mais
surabondants critiqués par la septième branche ne peut être accueilli ;
Mais sur le second moyen :
Vu l’article L. 1226-1 du code du travail ;
Attendu que pour condamner la société Neudis à verser à Mme X... une somme au titre des
compléments de salaire liés à l’arrêt maladie, l’arrêt retient que le contrôle médical ayant été
réalisé 12 jours avant celui retenu pour la reprise possible du travail, le médecin contrôleur
n’a pu faire qu’une projection et émettre une hypothèse et que l’avis médical émis à l’issue
de cette contre-visite n’a fait l’objet d’aucun recours de la part de la salariée ;
Qu’en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu’elle avait constaté que le médecin
contrôleur avait conclu, dans le cadre d’une contre-visite effectuée régulièrement, à une
reprise du travail le 12 mars 2007, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales
de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu’il n’y a pas lieu à renvoi du chef faisant l’objet de la cassation, la Cour de
cassation étant en mesure de mettre fin au litige en application de l’article 627 du code de
procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a condamné la société Neudis à payer à
Mme X... la somme de 434 euros à titre de complément de salaire , l’arrêt rendu le 13 février
2009, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ;
DIT n’y avoir lieu à renvoi ;
Déboute Mme X... de sa demande en complément de salaire ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt
sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en
son audience publique du quinze septembre deux mille dix.